Le succès grandissant d’Uber, le service qui permet d’appeler un taxi sans passer par un répartiteur, m’a amené à réfléchir sur les plus récentes tendances en matière de stratégie commerciale. Je crois que nous assistons maintenant à la disparition des intermédiaires.
Partout, que ce soit dans le commerce de détail, les divertissements, les voyages, la gestion des évènements, les taxis et les petites annonces, les entrepreneurs qui traditionnellement gagnaient leur pain en fournissant de l’information ou en acheminant les produits des producteurs aux consommateurs se font écarter.
Uber illustre clairement ce processus. N’importe qui peut s’inscrire chez Uber et appeler un chauffeur pour aller du point A au point B dans une ville. Le service d’Uber existe maintenant dans plus de 200 villes à travers le monde. Les usagers peuvent utiliser leur téléphone intelligent pour faire venir une voiture, se servir du GPS intégré et des cartes, puis payer en ligne. Ils donnent ensuite une note au chauffeur sur une échelle de 1 à 5 (un chauffeur qui a une note moyenne inférieure à 4,5 est éliminé du service). Les tarifs varient selon la demande, ce qui signifie que vous pouvez obtenir une voiture en tout temps si vous êtes prêt à payer un taux plus élevé. Et il n’y a rien de mal à ça. C’est ainsi que l’offre et la demande sont sensés fonctionner, en trouvant le bon prix au bon moment.
Dans presque toutes les villes où Uber est présent, les chauffeurs de taxi et les répartiteurs sont furieux et se battent contre la compagnie et les voitures « sans permis ». Les armes comprennent l’intimidation des conducteurs inscrits chez Uber, le vandalisme des voitures d’Uber et les règlements municipaux. Mais rien n’empêche les clients d’utiliser le service. Nous sommes donc témoins de la disparition d’un type particulier d’intermédiaire : le répartiteur de taxi. Uber sera de plus en plus incontournable si vous voulez conduire un taxi .Uber a aussi créé d’autres services, comme la livraison de colis. Cela pourrait-il affecter Fedex et les autres services de livraison?
Il y a quelques semaines, Netflix a comparu devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). La compagnie a refusé de lui fournir ses données complètes sur ses clients canadiens. Jusqu’à tout récemment, les Canadiens n’ont eu accès qu’aux contenus des émissions et du câble approuvés par le CRTC, l’objectif étant de protéger les producteurs canadiens de contenu, et par extension, notre culture. Mais avec l’accès à Internet, les Canadiens (comme tous ceux situés là où Internet n’est pas censuré) peuvent regarder ou consommer tout ce qu’ils veulent, peu importe la provenance. Même s’il y a des restrictions sur la diffusion, disons d’une vidéo à l’extérieur du pays de son producteur, il y a toujours moyen de les contourner. Vous pouvez créer un réseau privé virtuel (VPN) et y accéder comme si vous étiez dans ce pays.
Il en résulte que les producteurs et distributeurs de contenu protégé à l’échelle nationale doivent concurrencer directement les producteurs étrangers, que cela leur plaise ou non. Comme pour les taxis, les clients achètent directement des fournisseurs ou passent par un type différent d’intermédiaire. Ces derniers demeurent des intermédiaires, mais loin d’être des centaines, voire des milliers, ils ne sont plus que quelques compagnies agissant surtout comme des entrepôts d’information. Les clients obtiennent l’information dont ils ont besoin, quand ils en ont besoin, et peuvent traiter directement avec les vendeurs. Le nouveau type d’intermédiaire est soit un simple service de commande soit un référentiel d’information.
Les exemples sont nombreux. Google a sérieusement amoché les intermédiaires en publicité, en devenant lui-même le marché où les mots et les images des annonceurs rencontrent directement les yeux des acheteurs. Les moteurs de recherche et Internet en général ont éliminé les Pages jaunes en tant qu’entreprise viable. Craigslist et d’autres services Web ont miné les annonces classées et les offres d’emploi locales. De plus, comme Uber et Netflix, tout cela se fait à distance, avec beaucoup moins d’employés, un bien meilleur accès et plus de flexibilité pour les usagers.
On se demande quel sera l’impact des données physiologiques générées par les montres intelligentes et d’autres appareils sur l’industrie des soins de santé. Si j’étais dans le domaine de l’assurance vie ou de l’assurance maladie, ou tout domaine lié aux soins de santé, voire des services funéraires, je me pencherais sur les retombées potentielles de ce nouveau phénomène.
Il est toujours prudent de vérifier comment votre entreprise peut être dépassée par les nouveaux concurrents qui arrivent de nulle part avec des produits et des services de substitution. Toutefois, si vous êtes dans un type de commerce où vous agissez surtout comme intermédiaire, il serait grand temps de revoir votre stratégie et votre modèle d’affaires pour évaluer votre degré de vulnérabilité à être dépassé par de futurs « Uber » et « Netflixe ».
La meilleure défense est l’offensive. Il est alors parfaitement sensé de trouver des moyens de lancer une attaque préventive de harcèlement et de voir comment vous pourriez prendre les devant face aux nouveaux entrants qui risquent de menacer vos positions.