Je me promenais avec ma femme sur le site du Festival international de jazz de Montréal tout en arrêtant ici et là pour écouter les musiciens de jazz. Je ne peux pas dire que je suis obsédé par ce genre musical, mais certains noms, plus ou moins récents, me font tendre l'oreille : Bublé, Metheny, Sinatra, Coltrane, Jarrett, Davis. Mes connaissances musicales sont limitées, mais je sais reconnaitre la qualité artistique d'une bonne improvisation. Je sais aussi reconnaitre le dilettantisme musical.
Ceci m'amena à réfléchir au rôle de l'improvisation dans un autre art, celui du leadership. Pour la plupart des gens, l'improvisation c'est l'essence même du jazz. À voir certains cadres à l'œuvre, on serait porté à croire que c'est la même chose pour la gestion et le leadership. Or, il y a bel et bien une hiérarchie de réussite, aussi bien dans la direction organisationnelle que dans le jeu de jazz. D'abord, le jazz.
Il vient un moment que le musicien en évolution s'essayera au jazz, particulièrement l'improvisation. Plusieurs sont appelés, peu sont élus. C'est facile de jouer quelques accords complexes ou encore un « 12-bar blues », mais ce n'est pas évident de se lancer dans l'interprétation d'un classique avec des musiciens inconnus, à l'oreille, en accompagnant les autres sans détonner, en prenant son solo au bon moment, tout en changeant de tonalité au beau milieu de la pièce. On se rend vite à l'évidence que le jazz, c'est un parcours de combat pour musiciens. Il faut avoir de très fortes connaissances musicales et, encore plus, connaitre son instrument comme le dos de sa main.
La réalité c'est que le jazz se construit sur une base musicale des plus solides. En somme, il faut apprendre à marcher avant de se lancer dans la course. Du moins, si l'on veut que les autres nous écoutent avec plaisir. Il y a des aventureux qui tentent de courir, mais qui peinent encore à ramper. C'est peut-être amusant pour eux, mais mes oreilles préfèrent rester à l'abri de leur « free jazz », refuge malheureux pour les grands maitres lassés de la mélodie, ou encore pour les amateurs en mal de connaissances et de compétences. Si t'as pas les « chops », il est mieux de suivre une partition. Le résultat ne sera peut-être pas enlevant, mais au moins çà accomplit le travail.
Il en va de même pour certains grands artistes dans nos organisations, qui prennent plaisir à improviser au jeu de la direction et de la gestion, sans se soucier du fait que çà détonne. La grande majorité n'a d'autre choix que d'improviser, puisqu'ils ont été plongés dans l'action sans avoir reçu les outils pour diriger avec confiance et précision. Les résultats sont souvent probants. En somme, ils improvisent, mais ils n'ont pas les connaissances de base pour le faire de façon adéquate.
Mais comme dans le jazz, l'improvisation au leadership se construit sur une base solide de connaissances, de compétences et d'expérience acquises par un travail systématique et graduel. Je ne nie pas qu'il y ait bel et bien des cadres qui puissent réussir comme chefs sans une approche systématique préalable. Toutefois, il reste que la plupart des gestionnaires auraient avantage à suivre une formation rigoureuse avant de se lancer, et lorsqu'ils doivent performer, d'avoir une partition à lire.
Beaucoup d'écrits sur le leadership notent l'intuition et le flair des grands dirigeants d'entreprise et d'organisation sans parler du travail de base qu'ils ont effectué avant de pouvoir improviser. Le jugement et l'intuition sont le résultat de connaissances et de compétences acquises par l'étude, l'expérience et la réflexion. Par ailleurs, les structures de soutien ont aussi leur rôle à jouer. La direction stratégique est critique, mais le succès et la prospérité dépendent aussi de la qualité de gestion et de direction à tous les niveaux organisationnels. C'est ce que la société General Electric a compris depuis des lustres et que toutes les entreprises et organisations doivent aussi réaliser tôt ou tard.
Voici quelques-unes des compétences de base nécessaires à l'exercice d'une direction efficace. Ce n'est pas une liste complète, mais vous pouvez voir le genre d'apprentissage qui est utile pour améliorer la direction organisationnelle.
· Connaissance élémentaire de la psychologie de la motivation et de l'influence
· Communications écrites et orales
· Techniques de présentation devant un groupe
· Faire une appréciation du temps et établir des priorités de travail
· Établir et analyser les facteurs influençant une décision
· Établir et comparer les pistes alternatives de solution
· Créer un plan pour atteindre ses objectifs et le communiquer à son équipe
· Créer un ordre du jour et diriger une réunion
· Surveiller le rendement individuel et de groupe en effectuant des mises au point
· Gérer les conflits et bâtir l'esprit d'équipe
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