Un principe fondamental de la stratégie militaire veut qu'on ne prenne un risque important que s'il peut conduire à une victoire majeure. Le Débarquement en Normandie constituait un grand risque, mais la récompense potentielle était énorme, comme l'ont prouvé les événements subséquents. Le même principe s'applique en matière d'investissement. Dans ce domaine, le concept de concordance entre le risque et la récompense est bien établi (bien qu'il ne soit pas toujours appliqué).
Cette logique s'applique aussi en affaires. Les entreprises devraient connaître leur rendement par rapport au risque. Elles doivent identifier les risques auxquels elles s'exposent (et les quantifier si possible), trouver des façons pour les prévenir ou les atténuer, et identifier une possibilité claire de faire des profits ou d'obtenir une récompense en contrepartie des risques qui ne peuvent être éliminés. Les risques et les récompenses potentielles devraient concorder pour obtenir un rendement raisonnable par rapport au risque dans tous les secteurs commerciaux. Les risques importants ne devraient être pris que s'ils ont le potentiel de générer d'importants résultats positifs.
Voici deux cas relativement typiques. L'entreprise A affiche depuis longtemps des résultats éblouissants dans sa principale activité commerciale. Les clients sont heureux, les investisseurs sont heureux, ses milliers d'employés sont heureux. La seule ombre au tableau est une nouvelle technologie qui vient d'être mise sur le marché par un petit concurrent et qui entame un segment mineur du marché que la compagnie A n'a jamais pu pénétrer. Le vice-président R&D considère que cette technologie entraîne des perturbations, mais le vice-président Marketing et Ventes en a parlé à tous les principaux clients de l'entreprise, et ces derniers ne sont pas du tout intéressés par cette technologie.
Dans le deuxième cas, la compagnie B est une petite entreprise fondée par trois anciens employés de la compagnie C, la principale concurrente de l'entreprise A. La compagnie B est en activité depuis 3 ans et tire le diable par la queue la plupart du temps, bien qu'elle soit celle qui a mis sur le marché la nouvelle technologie qui perturbe. Les ventes vont bien, mais les finances sont encore fragiles d'un mois à l'autre. L'entreprise B compte environ une centaine d'employés, mais ses autres frais généraux sont peu élevés, toute la fabrication et la logistique étant imparties à des fournisseurs fiables. L'entreprise se concentre sur le développement de nouveaux produits et un marketing agressif ciblant la clientèle traditionnelle et non traditionnelle de son secteur d'activité.
La question est la suivante : Laquelle de ces deux entreprises aura un meilleur rendement par rapport au risque? Est-ce la compagnie A qui a des résultats éblouissants et d'excellentes relations avec ses principaux clients? Ou est-ce la compagnie B qui connait un démarrage chancelant avec un nouveau produit génial mais peu de capitaux et une seule gamme de produits?
L'entreprise A, étant le concurrent bien établi, est prisonnière de sa clientèle actuelle. Celle-ci rapporte des revenus et des profits très intéressants, mais tout le monde dans l'entreprise est axé sur la satisfaction des clients existants. L'entreprise a aussi d'importants frais généraux, des milliers d'employés qu'il faut garder productifs, et des investisseurs à satisfaire.
Les résultats de la compagnie A ont été extraordinaires, mais quel est le potentiel de croissance future de sa principale activité? Il y a des menaces extérieures, mais quelles sont-elles exactement? Il y a bien la compagnie B, mais elle ne vend qu'à un segment marginal du marché. En vérité, la compagnie A court un risque, mais elle n'est pas consciente de son ampleur. Elle n'a pas non plus une compréhension claire des retombées positives qui pourraient en découler. La compagnie A doit faire face à plusieurs risques assez vagues, et l'image de sa future croissance et de ses profits à venir demeure floue. Au bout du compte, son rendement par rapport au risque est incertain.
La compagnie B est la jeune entreprise à fort potentiel de croissance dont le statut est encore précaire. Elle a peu de ressources pour répondre à une contre-attaque des entreprises établies, mais elle a aussi beaucoup moins à perdre en comparaison de celles qui sont en place. De plus, si elle réussit, les retombées vont être gigantesques. Le rendement par rapport au risque de la compagnie B est élevé, et c'est ainsi que les choses devraient être. C'est pourquoi les investisseurs et les sociétés de capital de risque recherchent ce genre d'entreprises. Si les risques sont élevés, les retombées potentielles le sont aussi.
La situation de la compagnie A est beaucoup plus commune et beaucoup plus difficile à gérer. Toutes les entreprises font face à des risques. Le défi consiste à évaluer leur relative probabilité et leurs conséquences, pour ensuite les comparer aux retombées potentielles, de façon à avoir un rendement raisonnable par rapport au risque. Quel est votre rendement par rapport au risque? Pourriez-vous identifier tous les principaux risques et les jumeler à des retombées positives potentielles?
Retour aux infolettres