Si la défense est la forme de guerre la plus forte, malgré son objectif négatif, il s'ensuit qu'elle devrait être utilisée tant que la faiblesse l'exige, puis abandonnée dès que nous sommes suffisamment solides pour poursuivre un objectif positif
Clausewitz
Clausewitz a souligné il y a presque 200 ans ce que tous les soldats savent très bien, à savoir que la défense est intrinsèquement plus forte que l'attaque. En règle générale, les forces attaquantes doivent être au moins trois fois plus fortes que les forces défensives. Dans de nombreux cas, elles devraient être encore plus importantes, surtout au moment décisif.
Toutefois, la défense est rarement, voire jamais, décisive. C'est seulement une mesure temporaire avant de reprendre l'offensive. À la guerre comme en affaires, il y a trois raisons principales pour se mettre sur la défensive :
- Pour gagner du temps ou retarder une attaque avant de pouvoir reprendre l'offensive. Par exemple, les grands producteurs et câblodistributeurs d'Amérique du Nord ont décidé d'investir dans un niveau minimum d'accès à l'Internet pour leur programmation. Il s'agit d'une démarche purement défensive pour protéger leur droit de contrôler la programmation tout en gagnant du temps jusqu'à ce qu'ils puissent déterminer de quelle manière évolueront le marché et l'industrie.
- Pour se reposer, se reconstituer et récupérer après une offensive réussie. C'est comme lorsque les entreprises essaient de s'implanter dans un nouveau pays, elles établissent habituellement une « tête de pont », puis récupèrent pendant qu'elles construisent leur infrastructure sur place. La même chose se produit souvent après une prise de contrôle majeure, qui peut être perçue comme une importante démarche offensive. L'acheteur prendra des mois, et parfois même des années, pour intégrer la cible prise en charge. Par conséquent, l'accent sera surtout mis à l'interne plutôt qu'à l'externe.
- Pour consolider une nouvelle position qui a été gagnée suite à une offensive. L'iPhone a été introduit en 2007 et a immédiatement perturbé les communications mobiles et l'informatique. Les autres fabricants de téléphones cellulaires ont été déstabilisés. Apple a depuis gardé une avance sur la concurrence en proposant des mises à jour annuelles, mais ce qui a vraiment permis à Apple de garder la concurrence en déséquilibre a été la création de l'App Store en 2008. L'App Store a conféré un avantage certain à Apple, car il a permis à la société de consolider sa position en renforçant la fidélité des premiers acheteurs.
Quels sont alors les principes de défense en affaires?
Défense tous azimuts. Les positions défensives doivent toujours être aménagées en supposant que l'attaque puisse provenir de n'importe quel côté. Par conséquent, les entreprises doivent rechercher les nouveaux produits ou services qui peuvent mettre en danger leur position sur le marché actuel. Elles doivent également rechercher les nouveaux venus et concurrents dans les secteurs inhabituels.
Terrain vital. Les défenses ne doivent concéder aucun terrain vital à l'attaquant et couvrir toutes les approches clés. En affaires, le terrain vital peut être assimilé aux principaux clients d'une entreprise, ceux qui achètent de façon répétée et se font les apôtres de ses produits et services. Les entreprises doivent être prêtes à traiter les principaux clients avec respect et éviter de se les aliéner.
Soutien mutuel. Les défenses doivent avoir des points forts qui se soutiennent mutuellement. Ainsi, si l'une ou plusieurs d'entre elles subissent une attaque directe, les autres peuvent apporter leur appui, soit pour étouffer l'attaque ou soutenir une contre-attaque. En affaires, cela peut être assimilé aux produits et services qui se soutiennent mutuellement dans l'esprit des clients et qui leur offrent une valeur synergique. De cette façon, si un client désire changer pour les produits d'un concurrent, il sait qu'il devra peut-être changer tout le système de soutien, ce qui entraîne des coûts de transition.
Défense en profondeur. Les défenses doivent être aménagées avec des lignes successives de fortifications et d'obstacles pour ralentir et canaliser l'attaquant. De cette façon, l'attaquant éprouvera des difficultés après avoir franchi la première ligne de défense. L'équivalent en affaires est de développer des formes d'exclusivité qui rendent la concurrence difficile, comme les brevets et autres renseignements exclusifs. Toutefois, ces obstacles défensifs ne peuvent que retarder une avance mais pas l'arrêter. Pour bénéficier d'une véritable défense commerciale en profondeur, les entreprises doivent s'assurer que leur position concurrentielle est confortée par de multiples avantages pour le client. Les produits et services qui se font seulement concurrence sur les prix ou sur une ou deux caractéristiques distinctes, sont souvent les plus faciles à supplanter.
Forces en réserve. Un commandant averti sait qu'il doit toujours garder des forces en réserve pour contrer toute attaque ou vulnérabilité imprévue. Ces forces doivent rester inutilisées le plus longtemps possible et être reconstituées immédiatement après leur utilisation. Les entreprises doivent faire de même en conservant des réserves de liquidités pour contrer les menaces des concurrents. Elles doivent aussi être prêtes à réaffecter les ressources des produits et services non rentables à ceux qui méritent d'être protégés et consolidés.
Défense active. Les défenseurs doivent être prêts à contre-attaquer pour conquérir le terrain perdu, surtout si ce terrain est vital pour la défense. Le meilleur moment pour contre-attaquer est quand l'ennemi vient tout juste de terminer son attaque et tente de consolider sa position. C'est le moment de vulnérabilité maximale pour un attaquant. En affaires, les entreprises doivent toujours contre-attaquer les avancées des concurrents. Si un concurrent introduit un produit similaire, elles doivent être prêtes à rester au premier plan en proposant une version améliorée de leur produit, immédiatement après que le concurrent ait introduit son produit imitateur. Le concurrent n'aura d'autre choix que d'innover plus rapidement ou baisser ses prix. Dans les deux cas, les marges sont beaucoup plus faibles pour le nouveau venu, qui restera plus vulnérable aux actions agressives continues du titulaire.
Retour aux infolettres